José Levy,
Leblon Delienne
Le Maître des KOKESHI!
par Véronique Dupard-Mandel
Publié le 17 avril 2022
©estheteplace
Marceline Loridan-Ivens disait que l’on a l’âge de son traumatisme. A la rencontre de José Lévy on peut aussi penser que l’on a l’âge de son enchantement.
Ainsi, il serait possible que l’enfance de José, auprès de grands-parents immergés dans la culture et l’art de vivre japonais l’ait enchanté pour toujours. Et, qu’il en garde une irrésistible envie de nous enchanter à son tour.
Sa fascination pour les Kokeshi, ces petites poupées ancestrales en bois laqué sans bras ni jambe qui nous font penser à des quilles, il l’a transposée dans un monde ultra contemporain et même méta-futuriste.
Ainsi le designer-plasticien, a créé, en collaboration avec la maison Leblon Delienne, cinq Kokeshis stylisées, surdimensionnées (de 90 cm à 2,80 m), noires comme un tableau de Soulages, mates ou ultra brillantes, de différentes matières (cuir, bois brulé, laques, résines).
Cette première série est envoutante : posées sur un sol qui pourrait être de marbre, en pointe de diamant, tatami ou échiquier géant, elles ressemblent à une petite cour. On imagine celle-ci Reine ou princesse et celles-là sujets, favorites ou demoiselles… Tour, Fou, Cavalier ou simple Pion. Peut-être parce que ces poupées, en apparence innocentes, cachent une identité plus complexe. Dans la tradition japonaise les jolies et gentilles Kokeshi, fabriquées dans le bois des forêts du Nord-Ouest (région du Tōhoku) lieu ou persiste encore aujourd’hui les traditions chamaniques, ont en effet une fonction plurielle. « Kawaï » et Inquiétantes. Selon la légende populaire elles sont garantes de sagesse, d’une bonne santé, d’une vie épanouie, on les offrait aux enfants au début de l’hiver et aux beaux jours on les brulait. Mais il est aussi fréquent d’en envoyer à la place d’un enfant qui ne viendrait pas, ou qui n’est pas venu, en cela on retrouve des similitudes avec les cultures des indiens Hopi d’Arizona et leurs « Kashina » ou bien des Yorubas du Nigeria et leurs « Ibedji » célébrant le culte des jumeaux.
Il serait donc possible que toutes ces représentations des esprits, farceurs, espiègles, bienfaisants ou malfaisants, constituent une sorte d’inventaire du monde visible et invisible. Il est donc logique qu’à la faveur d’une pandémie qui a paralysé durant deux ans et demi le projet Kokeshi de José Lévy et Juliette de Blegiers, l’esprit même de JL, eut été envouté. Laissant surgir, pour notre plus grand bonheur, quarante-six nouvelles silhouettes virtuelles. Celles-ci colorées et turbulentes, celles-là virevoltantes à la manière d’un derviche ou d’une toupie et abouties sous la forme de NFT.